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Pour s’adapter il faut agir, mais pas sur-réagir

Par Bernard Milian

Si vous êtes responsable opérationnel de la supply chain dans l’industrie, vous avez le goût de l’action. Réagir vite, décider, une petite dose d’adrénaline sous stress, c’est votre quotidien.

Si vous êtes responsable opérationnel dans les ventes il faut que ça bouge. Signer une affaire, apporter une réponse décisive qui laisse les concurrents sur le carreau, lancer une promotion qui va marcher du tonnerre, une petite dose d’adrénaline sous stress, c’est votre kif.

L’action est au cœur de la marche de nos entreprises C’est une valeur implicite pour les manageurs, et encore plus pour les équipes de direction. Ne pas agir c’est rester sur place et donc prendre du retard, n’est-ce pas ?

Dans certains comités de direction insuffisamment féminins auxquels je participais ceci était exacerbé par une bonne dose de testostérone : il faut prendre des décisions plus radicales, plus vite et plus fort que son collègue…

Action et VUCA

Dans un environnement de plus en plus incertain et difficile à décoder, cette culture de l’action est-elle bénéfique ? Le risque est d’agir sur la base de signaux qui ne sont pas explicites, et que l’on interprète mal.

Comment faire la part des choses entre le besoin d’adaptation – s’assurer que l’on adapte l’entreprise à l’évolution de son environnement – et la surréaction à un épiphénomène ?

La surréaction est une réalité dans la majorité des entreprises. Par exemple, dans mon expérience opérationnelle et de conseil, j’ai été confronté plus souvent à des changements radicaux de plan de production liés à des décisions internes qu’à une réelle évolution de la demande des clients externes. En d’autres termes, on se prend nous même les pieds dans le tapis en voulant agir à tout prix.

J’en suis sûr, vous connaissez des exemples dans votre propre entreprise : on a été super optimistes sur les prévisions de vente de la campagne promotionnelle et il faut freiner des quatre fers, on est passés en 2×8 au lieu de 3×8 et on n’arrive plus à suivre, on a trop réduit / augmenté les stocks et on doit… etc.

Lors du premier confinement pour Covid-19 j’avais partagé la vidéo d’Eli Goldratt ci-dessous avec un de mes clients. Celui-ci s’apprêtait à arrêter son usine principale du fait de la chute brutale d’activité, alors qu’il avait été en surcharge chronique depuis des mois voire des années, et que son marché était structurellement porteur. Dans cette vidéo Dr Goldratt nous engageait à adopter une vue d’ensemble du système et de la situation avant de prendre une décision éclairée.

Sous la pression du court terme, cette entreprise a effectivement arrêté ses opérations industrielles, et s’est retrouvée ensuite confrontée une paire de mois plus tard à une situation très difficile de sous capacité du fait d’une reprise « plus rapide et forte que prévu ». Etait-ce vraiment imprédictible ?

En même temps, il aurait été difficile pour ses décideurs de maintenir le flux de production, ce serait allé à l’encontre du bon sens commun ou de l’opinion majoritaire du moment : l’activité chute, il faut agir ! Quel actionnaire comprendrait qu’on n’agisse pas ?

Volatilité mais Inertie

Un paradoxe de nos marchés est qu’il est de plus en plus difficile de prévoir, et qu’en même temps il y a beaucoup d’inertie. Si vous avez été prévisionniste, vous l’avez sans doute vécu. Vos commerciaux prévoient des changements de demande importants – des changements induits par leurs actions – commerciales et marketing. La réalité est que ces changements, dans la plupart des marchés, n’arrivent jamais aussi brutalement : les clients ont des habitudes de consommation, il y a des flux existants dans la supply chain qui s’écoulent à un certain rythme, il y a structurellement de la continuité.

La réalité des signaux de demande « sell out » reflète souvent une grande stabilité, ou une progressivité dans les évolutions. Tout l’enjeu du pilotage par la demande est d’adapter l’entreprise a l’évolution de cette demande réelle, en propageant de manière autonome des signaux de réapprovisionnement déclenchés par les consommations. Caler les cadences de l’entreprise sur le marché, de manière autonome et en grande partie automatique.

Le modèle DDMRP intègre cela : stabilisation via une consommation moyenne jour lissée, modèle adapté seulement par exception, ajustement progressif du modèle via des boucles fermées d’adaptation, alignement des équipes sur les priorités et les seuils de décision, modèle de réapprovisionnement autonome et automatique cadencé par la demande réelle…

Arrêtons de bruiter le signal

En tant qu’acteurs dans une supply chain, notre rôle n’est pas de prendre des décisions à tout va, car une bonne partie de ces décisions conduit à distordre le réel signal de demande. Nous nous infligeons de la variabilité à nous même. Notre rôle est de mettre en œuvre un modèle d’adaptation pertinent et progressif, cadencé sur la dynamique réelle des marchés que nous servons.

Ce changement de perspective n’est pas simple à adopter : il requiert souvent une évolution de la mentalité de nos managers. Un plan d’action de la Supply Chain Demand Driven nécessite :

  • Moins de focus sur l’action court terme
  • L’adoption d’une vue d’ensemble
  • Des mesures de performance individuelles et d’équipe qui favorisent cela

Des logiciels intuitifs fournissant une visibilité d’ensemble, favorisant la stabilité et une action par exception sont un élément structurant. Mais ça ne suffit pas. Après tout, « thoughtware before software », comme le préconise le Demand Driven Institute.

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